Images en coupe de différentes couleurs d’une toile d’araignée, combinées dans une image 3D/Isabelle Su et Markus Buehler
Les araignées sont des bâtisseurs hors pair, tissant de manière experte des fils de soie pour former des toiles 3D complexes qui leur servent de maison et de terrain de chasse.
Si les humains pouvaient entrer dans le monde des araignées, ils pourraient en apprendre davantage sur la construction des toiles, le comportement des arachnides, etc.
Hier, des scientifiques ont annoncé qu’ils avaient traduit la structure d’une toile en musique, ce qui pourrait avoir des applications allant de l’amélioration des imprimantes 3D à la communication entre espèces et à des compositions musicales d’un autre monde.
« L’araignée vit dans un environnement de cordes vibrantes », explique Markus Buehler, docteur au MIT, chercheur principal du projet, qui présente les travaux. « Elles ne voient pas très bien, donc elles perçoivent leur monde par des vibrations, qui ont des fréquences différentes ». Ces vibrations se produisent, par exemple, lorsque l’araignée étire un brin de soie pendant la construction, ou lorsque le vent ou une mouche piégée déplace la toile.
Buehler, qui s’intéresse depuis longtemps à la musique, s’est demandé s’il pouvait extraire des rythmes et des mélodies d’origine non humaine de matériaux naturels, comme les toiles d’araignée. « Les toiles pourraient être une nouvelle source d’inspiration musicale, très différente de l’expérience humaine habituelle », dit-il.
En outre, en faisant l’expérience d’une toile à la fois par l’ouïe et par la vue, Buehler et ses collègues du Massachusetts Institute of Technology (MIT), ainsi que son collaborateur Tomás Saraceno du Studio Tomás Saraceno, espéraient obtenir de nouvelles informations sur l’architecture et la construction en 3D des toiles.
Avec ces objectifs en tête, les chercheurs ont scanné une toile d’araignée naturelle avec un laser pour capturer des coupes transversales en 2D, puis ont utilisé des algorithmes informatiques pour reconstruire le réseau 3D de la toile.
L’équipe a attribué différentes fréquences sonores aux brins de la toile, créant ainsi des « notes » qu’elle a combinées selon des modèles basés sur la structure 3D de la toile pour générer des mélodies. Les chercheurs ont ensuite créé un instrument ressemblant à une harpe et ont joué la musique de la toile d’araignée lors de plusieurs représentations en direct dans le monde entier.
L’équipe a également créé une installation de réalité virtuelle qui permet aux gens de « pénétrer » visuellement et auditivement dans la toile. « L’environnement de réalité virtuelle est vraiment intriguant car vos oreilles vont capter des caractéristiques structurelles que vous pourriez voir sans les reconnaître immédiatement », explique M. Buehler. « En l’entendant et en le voyant en même temps, vous pouvez vraiment commencer à comprendre l’environnement dans lequel vit l’araignée. »
Pour mieux comprendre comment les araignées construisent leurs toiles, les chercheurs ont scanné une toile pendant le processus de construction, transformant chaque étape en musique avec différents sons. « Les sons émis par notre instrument ressemblant à une harpe changent au cours du processus, reflétant la façon dont l’araignée construit la toile », explique M. Buehler.
« Nous pouvons donc explorer la séquence temporelle de la construction de la toile sous une forme audible. » Cette connaissance, étape par étape, de la manière dont une araignée construit une toile pourrait aider à concevoir des imprimantes 3D « imitant les araignées » qui construisent de la microélectronique complexe. La façon dont l’araignée « imprime » la toile est remarquable, car aucun matériau de support n’est utilisé, comme c’est souvent le cas dans les méthodes d’impression 3D actuelles », explique-t-il.
Dans d’autres expériences, les chercheurs ont étudié comment le son d’une toile change lorsqu’elle est exposée à différentes forces mécaniques, comme l’étirement. « Dans l’environnement de réalité virtuelle, nous pouvons commencer à écarter la toile, et lorsque nous le faisons, la tension des cordes et le son qu’elles produisent changent. À un moment donné, les brins se cassent et produisent un son de claquement », explique M. Buehler.
L’équipe souhaite également apprendre à communiquer avec les araignées dans leur propre langage. Ils ont enregistré les vibrations de la toile produites lorsque les araignées effectuent différentes activités, comme la construction d’une toile, la communication avec d’autres araignées ou l’envoi de signaux de séduction.
Bien que les fréquences soient similaires pour l’oreille humaine, un algorithme d’apprentissage automatique a correctement classé les sons en fonction des différentes activités. « Nous essayons maintenant de générer des signaux synthétiques pour parler le langage de l’araignée », explique Buehler. « Si nous les exposons à certains modèles de rythmes ou de vibrations, pouvons-nous affecter ce qu’elles font, et pouvons-nous commencer à communiquer avec elles ? Ce sont des idées vraiment passionnantes. »
(ÉCOUTEZ la musique de la toile d’araignée ci-dessous).
Source : Société chimique américaine
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