La désinformation virale se répand sur Twitter et Facebook : « Elections truquées ».

Il y a des marqueurs baveux et de faux prospectus de propagande, des vidéos de machines bloquées ou des cartes mystérieuses qui disparaissent ou apparaissent. Il y a les conspirations visant à faire voter ceux qui n’ont pas le droit de vote et à empêcher ceux qui veulent voter de voter. Et il y a la cible éternelle des conspirateurs : George Soros, accusé de posséder (et donc de manipuler) les machines d’enregistrement des bulletins de vote, Smartmatic (avertissement : c’est faux. Le propriétaire de Smartmatic est une personne qui siège au conseil d’administration de l’Open Society de Soros). Sur le web depuis le 3 novembre, on assiste à une avalanche de fausses informations, construites ad hoc, diffusées sur des groupes privés sur Facebook mais aussi plus souvent mises en circulation par des politiciens de premier plan. Paradoxalement, le premier intervenant dans les fausses nouvelles électorales est le président des États-Unis.

La machine de désinformation fonctionne, plus ou moins depuis l’étranger, depuis les élections de 2016. Avant le vote, le discours public pollué s’est concentré sur de fausses histoires concernant les candidats, en particulier Joe Biden et sa famille. Depuis le jour des élections, la poste, la vidéo, le « bouche à oreille » se sont concentrés sur le thème des « élections truquées ». Suivant un scénario qui trouve en Donald Trump le premier orchestre, le but de cette propagande est de montrer que le vote du 3 novembre n’est pas légitime. La victoire éventuelle de Biden n’est donc pas acceptable.

Le chef des désinformateurs. Les plaintes de M. Trump le jour de l’élection ont été partiellement censurées par Twitter et Facebook, qualifiées d' »informations trompeuses ». Mais le problème ne concerne pas seulement le compte de Trump : le tweet dans lequel il criait par exemple au « vol » de l’élection a été relancé par des milliers de comptes proches de lui, selon des ordres précis de l’équipe : selon une analyse du New York Times, au moins 750 comptes avec 1,5 million d’adeptes au total ont reproduit le tweet plus de mille fois, avec 9000 retweets. A la fin de la journée, le tweet avait été traduit dans toutes les langues du monde, du coréen à l’indonésien. Le hashtag #StopTheSteal en Pennsylvanie a atteint 2000 mentions en 15 minutes mardi matin, pour atteindre 12 800 à midi. Il s’agissait en grande partie d’accusations contre les démocrates, liées à des articles ad hoc sur des sites de droite comme The Gateway Pundit et le National Post, selon le New York Times.

Cartes, marqueurs, vitres teintées. Parmi les histoires fantaisistes qui circulent sur les médias sociaux, le « Sharpiegate » (le scandale des marqueurs) se distingue. Dans le comté de Maricopa, le dernier comté à avoir été compté en Arizona, des comptes républicains (relancés sur Twitter par le fils de Trump, Eric) ont affirmé que des marqueurs défectueux étaient distribués aux électeurs républicains lors des scrutins (se distinguant comment ? Selon l’enregistrement, peut-être, mais il ne devrait pas être connu au bureau de vote) afin que leurs bulletins de vote soient « défectueux » et rejetés par les machines de validation. Là aussi, les autorités locales ont totalement démenti les rumeurs.

À Detroit (Michigan, autre État décisif), les caissiers ont dû occulter les vitres de leurs sièges après que le bouche à oreille sur les médias sociaux eut rassemblé des milliers de personnes devant le lieu où ils travaillaient pour protester contre la prétendue « fraude ». Intimidés par le fait que les gens les filmaient – on ne sait jamais comment les vidéos peuvent être utilisées, et de toute façon il est interdit de le faire dans un bureau de vote – les scrutateurs ont étalé des feuilles sur les fenêtres. Et cela a bien sûr donné naissance à de nouvelles théories du complot : que cachent-elles ?

Toujours dans le Michigan, un membre de la campagne de M. Trump a fait circuler des montages d’images pour faire croire que les démocrates volaient autour d’un siège, photos démenties plus tard par une vérification des faits. Et puis il a filmé des gens prétendant avoir reçu des offres d’argent (5 dollars) pour voter pour Biden.

Ensuite, il y a le grand classique du vote des morts. Dans le Michigan, la rumeur a circulé que plus de 800 personnes mortes figuraient parmi celles qui avaient déjà voté par correspondance. Les autorités de l’État ont alors expliqué qu’il s’agissait de personnes décédées entre l’envoi du bulletin de vote et le jour de l’élection, et dont le vote a été annulé conformément à la réglementation.

Même à Philadelphie, des photos qui se sont révélées plus tard être des cartes de tarot ont été diffusées pour démontrer la propagande des démocrates dans les sondages. Tout comme les images circulant des urnes retournées dans la poubelle se sont révélées vieilles. Ou bien de mystérieuses « urnes » arrivaient en Virginie juste au moment où elle « devenait rouge », alors qu’il s’agissait de transports normaux de bulletins de vote depuis les bureaux de poste.

Groupes Facebook. Il est confirmé que Facebook est l’un des plus puissants canaux de diffusion de la désinformation, malgré les efforts annoncés par les médias sociaux de Zuckerberg contre les fausses nouvelles. Surtout les groupes privés et publics. Certains d’entre eux avaient déjà été utilisés ces mois-ci pour lutter contre le coronavirus, puis pour organiser les raids des tenants de la suprématie blanche lors des manifestations de Black Lives Matter. Ils ont maintenant été convertis en plateformes de diffusion et de conditionnement de contenu viral visant à délégitimer les élections. Facebook a manifestement du mal à suivre la prolifération de ces pages de plus en plus organisées. Des messages affirmant, par exemple, que Biden s’est vu attribuer 200 000 faux bulletins de vote ont été marqués par Facebook avec un « contexte manquant » peut-être un peu vague.

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